[JDR] Carnets de Kirkwood

Citation :

Les Genevois, qui croient reconnaître un vieil air français*, chantonnent et suivent Kirkwood. Et d’une, ça détend et c’est pas désagréable.
Et de deux, ma foi, ça n’a pas l’air inintéressant.
Et surtout, de tierce, Kirkwood chante vers le ciel et dirige ses effluves meurtriers vers Deos qui en a connu d’autres, on ne s’effraye pas pour Lui…
Mais toutes les bonnes choses ont une fin, et Kirkwood reprend son sermon. Explication de texte. Pourquoi ce cron n’est-il pas devenu enseignant ? Ca ferait des vacances…
Bon, en même temps, qu’il meurtrisse les jeunes générations ne s’impose pas non plus comme une idée enthousiasmante de prime abord. Pas plus qu’au second.

Brotha and sista, que nous apprenions c’te song ?

Qu’on estions tous ensemble dans Sa caraque immense qu’estions l’monde et qu’Il nous laissions nous partager !
Non point qu’on allions s’lécher l’museau les uns les autres, j’insiste, pis d’abord ce serions dégoûtant. Pis en plus, ça vous viendrions à l’idée d’faire la bise à la Spaparte ? Au Starkel ? A l’Aristocoquelet ? Beurk !

Frémissement d’horreur de la congrégation. Si les exemples proposés ne peuvent guère enthousiasmer, l’idée d’embrasser Kirkwood apparaît définitivement comme un martyr pour n’importe qui de censé…

Point n’estions là l’idée que Deos nous offrions un gâteau d‘sentimentalité niaise et nauséabonde à épuiser nerveusement l’neuneu moyen ! Nenni !

Mais même z’avec les plus absurdes crétins délégués du Sans-Nom, fallions faire z’avec.
On n’estions point là qu’entre nous, gens civilisés z’et de bonne compagnie, genre Genevois réformés pour l’essentiel pourrions-nous dire ! Fallions faire z’avec les zôtres, les pires adeptes du Sans Nom, pis z’aussi la masse des intermédiaires qu’estions pas forcément les ceusses qu’avec qui qu’on aurions du bon temps vu qu’ils estions point choisis, l’plus souvent.

Mais s’agissions z’aussi d’arrêter d’se stirlipoter en chouinant le gémissement face à qui qu’est pô pareil ni comme qu’on l’voudrait…
D’abord, parce qu’on avions ben vu des innommables, partisans de l’Ennemi d’Enfer, connaître la Révélation, parfois lente, parfois subite, et passer à la Réformation d’la Foi. Par la fréquentation des réformés d’abord z’et avant tutti frutti.
C’estions contagieux, quoi. Mais d’la contaminature moins dégoisante qu’le modèle courant, hein ?
Pas oublier d’ailleurs d’consulter not’toubib la vive Phonya, hein, si besoin étant, toujours prête à rendre service ! Là où elle passions, les mauvaises humeurs trépassions.

Reprenions. On choisit ses copains, mais rarement sa famille**, que je disions.
Adonc devions-nous continuer nos combats, notre lutte. Tant grand jihad contre nos mauvais penchants que le p’tit modèle (mais costaud au demeurant) contre l’Église papiste et ses séides. Séides conscients, tel le croisillon moyen, ou inconscients mais pétris d’égoïsme et obnubilés par leur quête du veau d’or, qu’on trouvions si souvent dans les élites nobiliaires z’et bourgeoises.
On continuons not’ lutte, vous dis-je ! Mais z’avec eux. Eux aussi estions dans l’main du God Tout-Puissant, vibrant d’émotion moite z’et de fulgurances tendres, s’abandonnant souvent dans l’innocence du jeu, sans trop chercher à comprendre et prêts à s’excusationner…

Adonc allons nous continuer à leur mettre des baffes.
Mais dans l’respect et en leur laissant place au repentir. Sur la base d’la liberté aristotélicienne, qu’estons si compliquée à comprendre pour les papistes…

Quand qu’on vous mettions dans un coin pour qu’vous puissiez point échapper aux mandales, z’auriez envie d’dire que vous avions fait connerlies ? Ou d’vous dresser pire encore, même si vous savions qu’l’avoine allions point être de blé tendre et qu’vous avions tord, dans l’fond ?
Y’a point portrait, j’croyons…

Ergo, pax ominibus même si tare ta goule.
J’avons les crocs, moi, j’croyons qu’il estions temps d’passer à la Cène, même si avions certainement possibilité d’détailler plus outre toutes les fitness d’cette chansonnette, biscotte bien comprise, elle faisions maigrir la connerlie…

Benitato benitature et ergo ma non troppo !


* En Confédération, on dit : « de l’Ouest ».
** Renaud, pour ceux qui ne connaîtraient pas

(HRP : la suite n’est pas écrite, tout le monde est bienvenu pour écrire et s’amuser… dans le respect du RP, s’entend….)

Là, Kirkwood, en train de prendre la tête à quelqu’un qui ne lui a rien fait, ne remarque pas tout de suite qu’il se passe quelque chose.
Schlurp, miam, z’estions bons, ces fourrés au miel, quoi ? Alors, bon, j’disions, pour la Jaja von Spaparte, c’estions dégénérée d’fin d’race, on l’savions tous, j’me demandions comment elle s’en rendions point compte elle-même*… Mh ?

Là, il voit que la personne ne réagit pas comme d’habitude. Vu qu’il est impossible qu’on ne soit pas d’accord avec lui, c’est forcément qu’il y a quelque chose. D’ailleurs, l’usage n’est guère que les yeux s’écartent pas comme ainsi ?
Miam, c’estions… C’estions vray qu’il faisions ben frais d’un coup, quelqu’un avions laissé porte ouverte ? C’estions bien pour que chacun puisse venir se nourrir, au moment de la Cène, en commémoration de… Gluuuuuuuuuups…

Là, Kirkwood en se retournant se rend compte que depuis quelques secondes, un silence inhabituel règne. Quand en plus, il voit ce qu’il voit, ben, il voit bien pourquoi**…



L’ours.
C’est un symbole en pays helvète.
Symbole positif, comme le montre la bannière d’Appenzell*** :


* La contradiction interne de cette déclaration montre bien la mauvaise foi lamentable de Kiki quand il s’y met…
** Toutes les illustrations historiques pour les post de Kirkwood dans ce culte du 24/10/62 sont tirées de Michel Pastoureau, « L’Ours. Histoire d’un roi déchu », Librairie du XXIe siècle, Seuil, 2007. Les dessins de BD proviennent de F’Murrr, « Éloge de la pentitude », Glénat, 2002.
*** Michel Pastoureau, op. cit., Bannière à l’ours du canton d’Appenzell, Suisse orientale, v. 1470/1480

Citation :

Laissons un moment Kirkwood se demander s’il hurle, fait pipi dans ses braies ou trouve quelque chose d’intelligent à faire tout en recommandant son âme au Saigneur. Tournons-nous vers les autres Genevois.
Certes, la plupart ont un réflexe relativement normal. Résumons ça rapidement : « J’ai laissé un truc sur le feu, je reviens tout-de-suite ».
Mais il est une autre catégorie, pénétrée de son devoir civique et imperméable au contexte.
Or, une ourse dans Saint-Pierrot, c’est sale.
Ce qui impose un petit détour.

Le sang helvète est d’une matière particulière.
Certains le font remonter à l’Arthus breton, d’autres aux Romains, mais toute personne un tant soit peu instruite sait que la seule explication possible trouve son origine sous les murs de Troie, dans le camp grec.
Ajax, bien sûr…

Réflexe héréditaire : ceux qui y ont pensé ont sur eux la cornette règlementaire, modèle confédéral MC1A001 et la dégainent.
Car un Helvète avec son MC1A001 règlementaire n’est jamais pris au dépourvu.
Trois courtes sonneries retentissent dans le temple et se propagent dans la cité.

Les regards guettent l’arrivée des secours. Tout en gardant Marcelle l’ourse à l’œil. Mais comme elle se dresse devant Kirk qui persiste à s’interposer entre elle et la table chargée, on continue de guetter. Même si cela manque peut-être un peu de charité aristotélicienne.
D’ailleurs, visiblement dégoûtée par l’odeur du Lecteur, elle se remet à quatre pattes et gagne la table, juste avant d’être interrompue par une Genevoise qui ne veut pas s’en laisser compter :

Argine a écrit:

- Vas-y t'en bien qu'j'va t'rosser tes grosses miches si t'enlèves pas d'suite tes grosses pattes d'la potée d'Kirkwood ! Et qu'j'suis sérieuse, foi d'Argine, du latin Regina qui veut dire reine ! Qu'm'en va t'faire la peau, qu'ça f'ra tout beau d'vant ma ch'minée !

Mais qu’une voisine corrige et assagit :

Argine a écrit:

- Argine, qu'c'est une espèce protégée c'te bestiole... Un symbole du pays même ! N'oublie pas ça, malheureuse...

- Alors bouffe...

La place libérée, Marcelle se jette sur la table et dévore tout ce qui passe à portée de ses pattes et de sa gueule.

Autour, les regards sont tendus et l’angoisse monte. Mais que font-« ils » ?
Soulagement, les têtes se tournent vers un bruit de cloche à vache.
Qui arrive à une vitesse tout-à-fait inhabituelle pour ce placide ruminant.

Deux hommes tout de blanc vêtus, arborant chacun une croix rouge helvétique et une cloche tintinnabulante au cou, l’un portant deux seaux remplis d’eau, l’autre une paire de balais, franchissent les portes de l’église aux cris –très mesurés, on est en Helvétie, quand même- de : Paimpont, Paimpont….
Évidemment, avec l’accent vaudois et la course, ça donne un truc du genre : Painnnnnnnn-Ponnt, Painnnnnnnn-Ponnt, Painnnnnnnn-Ponnt, Painnnnnnnn-Ponnt.

Il nous faut présenter ici le pourquoi de ce cri qui peut étonner le néophyte. Qu’il apprenne donc qu’il s’agit d’un hommage -peut-être un brin païen, faudra vérifier- à Merlin l’Enchanteur, qui a fait pleuvoir pendant deux mois sur la Bretagne après être tombé dans la fontaine de Paimpont.

- Service Méga Urgent de Répression de la saleté*, brigade genevoise, agents Omer et Ladislas, gentiment à votre service. Quelle est la cause de ? Ah ? Ah oui, quand même…
Ben non, alors. D’après le décret confédéral de non-cumul des responsabilités U1457, modifié 1458, amélioré 1460, article 23, section II, paragraphe 5, alinéa 4bis, ce n’est pas de notre ressort. Pas tant que « le référentiel agent et cause de la saleté n’a pas été rendu inopérant par les moyens civiquement appropriés ».
En plus, une espèce protégée… Ça nous mettrait gentiment dans le pétrin du boulanger, ça…

* En Helvétie, on n’allait pas coller une majuscule à « saleté », quand même…

J'aime bien Guimauve Tell, tiens !
Ah, et tant qu'à faire, je vous emprunte vos chats pour le suivant, Mad et Sanctus...

Citation :

--Guimauve_Tell a écrit:

- TELL ! Mon nom est Tell ! Guimauve Tell !

Ahhhhhhhhhhhhhhh… Soulagement collectif…
Aussitôt dit, aussitôt faiblit et tend tendancieusement une pomme :

--Guimauve_Tell a écrit:

- Tiens gentil nounours... Cadeau ! Je viserai directement la tête de mon fils, c'est pas un souci...

Voilà qui irait dans le sens de ces « Livres des vertus » apocryphes qui prétendent qu’une pomme a entraîné la chute d’Oanylone (ou un truc comme ça, c’est compliqué mais il y a une pomme, sûr).
Déception générale. La réputation des administrations helvètes va en prendre un coup…
Quant au physique de Guimauve Tell et des réformés, c’est à craindre aussi, vu le regard de Marcelle.
Toute l’assemblée a l’air de penser très fort :

Citation :

Oh Lord tell me,
Tell me why,
It is not because you ah ah, glups
It is not because
I look like a biscotte*, re-glups
C’est pourtant Tell
C’est tellement
N’importe quoi…

Marcelle s’approche de la pomme et du héros, nifle et renifle l’un et l’autre, dubitative, puis se décide.
BAM, fait Guimauve quand la patte gauche le projette vers à droite, alors que la pomme, interceptée par l’autre membre, file dans la direction opposée**.
Et roule jusqu’aux pieds de Kirkwood, qui profitait justement de cette petite diversion pour tenter de se carapater.
Or, si l’ours est omnivore, il a quand même une préférence pour les végétaux. En fait, ça dépend de beaucoup de facteurs, mais en ce qui concerne Marcelle, pas de problème.

Sauf Kirkwood. Car tout stupide et borné qu’il soit, il se doute bien que dans les facteurs modifiant les préférences alimentaires des plantigrades, on trouve aussi l’environnement, en particulier son potentiel agressif.
Kirkwood tente de se confondre avec l’environnement de la pomme, mais Marcelle arrivant sur ses quatre pattes ne semble pas vouloir le qualifier tout-de-suite de « non-hostile ». L’odeur y est peut-être pour quelque chose…

Marcelle se dresse sur ses pattes arrières, regarde Kirkwood en grognant. Le pauvre Lecteur ne peut s’empêcher de lâcher :

- Seigneur, inspirationnez des sentiments aristotéliciens à cet animal…

Et une voix anonyme dans la foule de murmurer :

- Seigneur, bénissez le repas que je vais prendre…

* D’ap Renaud, « It is not because you are »…
** Si, si, relisez, vous verrez, c’est cohérent

Citation :

Immédiatement après l’apparition du meilleur vendeur ibérique de couteaux de l’Aristotélicité, une voix se manifeste en même temps que son possesseur :

- Salve, Isidore Duchemin, contrôleur fiscal de Friberne. Disposez-vous d’une patente en bonne et due forme pour vendre ces produits ?

- Cuchillos ! Cuchillos que deben venderse !

- Hé, il a raison, Isidore, le commerce est libre à Genève, qu’est-ce que tu racontes-là ?!

- Il ne s’agit pas de le faire payer, mais de lui faire signer les autorisations confédérales CX-814, GR-12h37 et…

- Qué habla connerlies, lui ? Cuchillos ! Cuchillos que…

- Tu crois vraiment que c’es le moment ?!

- Force reste à la loi…

- Cuchillos o mierda ?*

Marcelle, intriguée par cet échange, s’est d’abord retenue, mais va couper court dans la disputation juridique en immolant Kirkwood. Elle lève la patte, et notre Lecteur révise en vitesse ce qu’il va pouvoir dire au Patron là-haut…
C’est jamais bon signe d’être convoqué pour un bilan de compétences.

Quand une forme pénètre à toute vitesse dans son champ de vision et grimpe le long de l’imposante masse de Marcelle, pour se retrouver sur sa tête.
Un chat. Qu’un autre poursuit. Grondement véhément d’indignation de Marcelle.
Kirkwood se dit qu’il vaut mieux être sourd qu’en entretien de motivation avec le Boss…  S’il n’identifie pas tout de suite celui qui est sur la tête de l’ourse, impossible de ne pas reconnaître Platon, le chat de Sanctus, et son faciès avenant :



Puis, Kirkwood se souvient : Moustache, le chat de Mad. Quoi qu’y foutions-là ?
Lectrices et lecteurs nous pardonnerons de ne point répondre et épiloguer plus oultre sur la présence icelieu des deux félins. Qu’il leur suffise d’aller se renseigner sur ce qui précède, si cela leur agrée.

Mais pour revenir à la scène qui perturbe la Cène, notons que Platon n’a guère l’air impressionné par la masse de Marcelle, pourtant rehaussée de Moustache. Platon crache tout ce qu’il peut, pendant que Moustache, bien accrochée par ses griffes à la tête de Marcelle, en fait autant.
Et Marcelle de gronder encore et encore, incapable de se décider entre le prétentieux à ses pieds ou le truc à griffes bien planté dans le sommet de son crâne…
Quand les chats décident de couper court et de continuer leur poursuite ailleurs, à une vitesse étonnante.

On se retrouve de nouveau avec Marcelle, encore moins contente qu’avant.
Sans oublier le vendeur de couteaux.

* - Couteaux, couteaux à vendre !
- De quelles bêtises se drape cette andouille ? J’ai grand souhait de proposer coutels icelieu, beaux coutels que…
- Bon, il vous faudrait prendre décision juste et pertinente, eu égard aux circonstances et mon manque de patience légendaire…

Mad, si tu as envie de faire trucider quelques participants par Machetemoi, fais-toi plaisir, hein ?
Sinon, l'objectif serait de faire intervenir un certain nombre d'animaux (alpins, de préférence, mais on n'en est plus à ça près, hein ?).