Madame Claude
Messages : 11774 Date d'inscription : 01/10/2010
| Sujet: [RP] Pensées Genevoises. Par Raoul Jeu 29 Déc 2011 - 17:37 | |
| [Raoul] - Citation :
- Vous avez lu l'histoire de Genève ? Comment qu'elle vécut, comment qu'elle est morte ? Ses hôtes et sa Vertu ? ça vous a plu, hein, vous en d'mandez encore ? Ben, ça, c'est l'histoire de... Raoul le glabre, qu'à part moi même personne, n'a jamais [...]. Je pompe, certes. Privilège du ventriloque furieusement shadok, je l'admets sans gêne. Quand y'a d'la gène, y'a pas d'plaisir. Et c'est comme ça. Tintintintin, tintintintin tin.
Genève, donc. La cité est vaste. La plus vaste de toute l'Helvétie. Elle trempe ses pieds délicats dans le lac le plus le plus profond de l'Aristotélité. Lac de Genève, comme il s’entend. Y'en a qui l'appelle Léman. Ce sont des gens de Lausanne. Mon spadassin se rappelle en avoir meurtri deux au trois, des lausannois qu'avaient rallié les calotins au nom d'Aristote, son Eglise très Sainte et la haine des genevois.
T'en veux ?
Genève, donc. A deux, mon routier déambule en claudiquant. Vous entendez la salive qui coule dans l'assonance ? Mince filet d'eau entre la pierre de calcaire qui fait les cimes alpines. Maigre doigt liquide qu'un lecteur faussement austère et vraiment réformé verse malicieusement dans un bénitier, juste pour faire du bruit et emmerder le curé recevant à confesse une petite grue écervelée qui pigeonne.
Fait passer.
Genève, donc. Ecluse du Ciel, où les passions font compter et sonner les thalers et rugir rageusement Pharaon trébuchant. Vivante. Quai Petitced, mon soldat est attrapé par un gamin. Deux sous et trois bouchées plus loin, il a engloutit l’oublie. Grand place, une lionne découvre son sein et quelques cicatrices au milieu des boutiquiers. Plus loin, deux passereaux innocents chantent L O L I T E A dans une charpente abandonnée. Impasse de l’Eglise. Tout est dit ?
C’est d’la bonne, hein ?
Genève, ton poisson fauve, monstre du Lac, sent l’encens et la myrrhe et l’or. Troisième ou quatrième épiphanie ? Genève vertueuse, la fève est dans ton cul. Et comme l’Escarboucle de la Vouivre, elle te donne la Vie Eternelle. Les oies pourprées du Capitole à la table de l’Ermitage mêlent l’or avec le fer. Et c’est comme grossi par la fonte des glaciers grondants, quand l’eau de ta bouche remonte au bord de tes dents […] Mon spadassin tire sur sa pipe. Les herbes de Veyrat lui remplissent la bouche. Le frisson fugace lui serre la mâchoire.
J’fais des trous, des p’tits trous […] [Raoul] - Citation :
- [Haute Saône. Ce qui se passe de toute autre didascalie, pour qui connait]
Il pleut.
Normal, vous m'direz.
Mais pousse-toi donc, bougre d'animal !
Il pleut.
Avez-vous déjà tenté de pousser un bœuf, plutôt vache de réforme, d'ailleurs, à tirer une chariote du diable dans les chemins détrempés du plateau des mille étangs ? Nan ? Essayez-juste pour rire. Du coté de Rignovelle, entre l'abbaye de Lure et celle de Luxeuil, y'a une ferme, ruinée bien entendu. Au beau milieu de la forêt. Un bel essart, certainement, mais jâââdis, certainement.
Il pleut.
Craaac !
J'invite mon lecteur à la complaisance. Depuis que le Seigneur l'a maigri de quelques 7500 écus, fort laborieusement gagnés depuis les caves de Reims jusqu'aux garrigues d'Aix, mon Raoul peine. Et c'est bien ma veine. Allez savoir quoi écrire des moult prouesses et horribles hauts faits d'un traine-savate et spadassin qui se refait dans l'importation et l'exportation de... stères de bois comtois... En contrebande en plus ! L'bois s'monopilise à des prix cloués en mairie, ma bonne dame. Allez faire fortune avec ça !
Cornecul !
L'essieu a lâché. Loi d'Raoul.
A senestre, un bois, une hure. Mais il pleut tellement que la laie n’sort même pas ses marcassins de d'ssous le verne. Pas folle, la bestiole ! Là ? Y'a Raoul. Il a les boules, l’est dans la bouse. Mon spadassin y est tellement trempé, là, qu'à coup sûr, ça va lui faire attraper la maladie du nez-qui-coule. A dextre, l'étang du Tambois. Vaste. Très vaste. Qui se confond même avec le ciel, là-bas au bout, tellement qu'il pleut.
Haute Saône. Ile verte. Vert glauque des carpières.
Mon héros s'assoit. Las.
Bon. alors, là, on tranche dans la glaise. On creuse un canal. On va d'c't'étang à la Lanterne. D'la Lanterne à l'Ognon. D'l'Ognon à la Saône. P'is au Rhône. Et d'là, on attend Cendres et sa nave. P'is on r'monte à G'nève.
[...]
Il pleut.
Qu'est-ce t'en dit, hein Marguerite ?
Marguerite est une montbelliarde aux yeux de biche. La plus belle conquête de mon Raoul après Mahaud. Lui dites pas, j'vais avoir des ennuis. [Raoul] - Citation :
[La vache et le genevois. Une grange ruinée du côté de Rignovelle. Entre Franchevelle et Linexert. Faut trouver. Il pleut]
Fait faim... Fait frais... Fait mouillé aussi... Mon routier a laissé l'essieu brisé à coté de l'étang. La chariote aussi et le bois aussi. L'appel du sec, que voulez-vous, ça vous fait prendre des risques. Assis sur un billot, mon Raoul trait Marguerite.
Qui vous êtes ! La voix est grosse et surtout, elle est dans l'dos de mon héros.
Cornecul ! Qu'il soupire.
Qu'est- ce que vous faites ici ?
J'vais vous expliquer... Que quand il lève les yeux sur les deux gens d'arme comtois, il n'y croit même pas.
Ahhhh ahhhh ! Genevois ! Qu'elle ricane, la maréchaussée du cru. Brigand ! Lion ! Hérétique ! L'accent, que voulez-vous...
Vi vi, diable aussi... Vous gentils, moi méchant. Qu'il marmonne.
Laissez-passer ?
Ben en fait, comme j'me suis trouvé une [...]
Vous crapule ! Cochon d'helvète ! Qu'elle interrompt péremptoire, la maréchaussée.
Moi, bucheron... Vache comtoise... Montbelliarde ! Bonne vache ! [...] Vous voulez du lait ?
Quand mon héros s'endort enfin, le Ciel est clair. Deux verres de lait vous suffisent quelquefois à rassasier l'intégrité des forces de l'ordre. La Franche Comté est ruinée dit-on. La corruption et les intérêts singuliers y règneraient en maître jusque dans les plus grandes maisons. Les églises sont vides. Les petits enfants travaillent durement dans les champs dès leur plus vertes années. Les femmes s'y prostituent pour gagner 5 écus et les brigands se sont saisis des routes. La misère. Soyons complaisants néanmoins. Mon lecteur ne l'ignore pas : mieux vaut être grand, beau, fort et genevois que petit, laid, pauvre et comtois ici-bas. C'est pas juste, mais c'est comme ça. | |
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